La santé mentale en prison

Le manque de soins mentaux en France

 

Premièrement, la suppression de la moitié des lits d’hospitalisation en hôpital psychiatrique dans les trente dernières années, a déplacé les malades vers les prisons. En effet, selon Laurent Ridel, directeur de l’administration pénitentiaire française, « la fermeture de lits psychiatriques a rempli les prisons ». De plus, ce déplacement s’explique aussi par la vision du malade mental dans la société. Ces dernières années, le risque que représente ce dernier pour la société a pris le pas sur la prise en charge de ses souffrances. C’est ce qu’on appelle la notion de dangerosité. Cette notion semble d’ailleurs s’être installée durablement dans le système français, qui préfère se protéger des malades plutôt que les soigner. 

 

Le parcours des malades mentaux vers la prison

 

Une autre raison de cette surreprésentation en prison est le manque de diagnostics par un psychiatre avant un jugement. En effet, bien que systématique dans les procès criminels, l’expertise psychiatrique est facultative dans les procès correctionnels. Cependant, 87% des détenus incarcérés en 2015, l'étaient pour des faits correctionnels. On comprend donc que la très grande majorité des détenus n’a pas accès à une évaluation psychiatrique, qui aurait pu mettre au jour des troubles justifiant un parcours de soin plutôt que l’emprisonnement. De plus, de nombreux magistrats ont une vision caricaturale des troubles mentaux, basée sur le modèle de la « folie totale », ce qui ne les motive pas à proposer des évaluations pour des troubles mentaux moins évidents. (Protais, 2016) 

Ce manque d’évaluations psychiatriques est malheureusement une tendance qui semble s’installer dans le système français. On le voit à travers les statistiques sur les décisions d’irresponsabilité pour cause de trouble mental. Ces dernières sont en déclin constant depuis les années 1980. 

 

 

Prise en charge au sein des prisons

 

La plupart des détenus présentant des troubles mentaux finissent en établissement pénitentiaire classique. Ils sont, dans la très grande majorité des cas, placés dans des endroits non adaptés à leur trouble. Ce manque de prise en charge est accentué par la surpopulation des prisons françaises, qui rendent les conditions de vie difficiles, ce qui tend à accentuer les troubles mentaux. De plus, les personnes souffrant de troubles mentaux étant rarement identifiées, quand leur état mental se dégrade, elles se voient souvent placées en cellule d’isolement pour de longues durées, ce qui ne fait qu’aggraver leur détresse mentale. Néanmoins, les détenus sont censés avoir accès à des soins en prison et cela inclut des consultations psychiatriques et psychologiques. Mais les délais d'attente sont longs et cela peut décourager certaines personnes à consulter. 

Un autre facteur important de la prise en charge au sein des établissements pénitentiaires, est la formation des surveillants. Ces derniers sont en effet quotidiennement au contact des détenus. Malheureusement pour ces derniers, les surveillants pénitentiaires français, ne reçoivent aucune formation spécifique sur la prise en charge des personnes qui souffrent de troubles mentaux. Ce manque de formation, couplé aux difficultés d’accès aux soins, se traduit par exemple à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis. Comme le rapporte la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté : « l’absence de lieux ou de moments destinés au dialogue des personnels pénitentiaire et médical nourrit, à tort ou à raison, l’impression que les informations données [par les surveillants sur des besoins d’extraction] restent sans suite » 

 

Pour conclure, la surreprésentation chez les détenus, de personnes présentant des troubles mentaux est la conséquence du manque d’engagement de l’Etat en matière de santé mentale ces trente dernières années. Il apparaît donc compliqué que la situation s’améliore, sans que l’Etat ne remette en cause toute sa vision de la santé mentale et de la prise en charge des malades. 

 


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